La géographie culturelle
Damien Deville
Formation de l’intervenant
Damien Deville a suivi des études scientifiques en se spécialisant en écologie scientifique jusqu’à la L3. Au cours d’un stage en Australie, il a constaté l’échec de la protection des Koalas par séparation de leur habitat des zones habitées. Cet Echec de la séparation nature-culture a constitué un déclic chez lui ce qui l’a conduit à se réorienter en master d’agroécologie-géographie au Muséum d’Histoire Naturel.
Pendant cette formation, il a découvert un nouveau personnage : le territoire et la problématique du déracinement qui lui est liée.
Problématique du déracinement et son origine
Être déraciné signifie habiter un territoire que nous ne connaissons pas dont nous ne connaissons ni l’histoire ni les milieux naturels. Ce déracinement remonterait aux monotéïsmes d’après Augustin Berque (1942-).
Le jacobinisme donne une première explication. Par exemple d’après Toqueville, nos propres lieux de proximité peuvent nous devenir étranger en raison de la centralisation : nous attendons qu’une autorité centrale intervienne. C’est une dépolitisation locale qui prend racine dans les grandes politiques d’aménagement du territoire.
Les grandes politiques de l’aménagement du territoire
Les grandes politique d’aménagement du territoire sur les deux derniers siècles ont eu deux grandes matrices idéologiques.
La théorie des avantages comparatifs
Il s’agit de l’idée que la spécialisation d’un territoire lui permet d’être compétitif en y développement un nombre limité de filières, cette décision émanant de l’autorité centrale de Paris.
La théorie des avantages comparatifs a plusieurs limites.
- En s’imposant, la spécialisation déchire le tissu relationel local. L’imposition des filières aux territoires peut s’interpréter comme une colonisation intérieure terme de Malcolm Ferdinand (auteur important dans l’écologie décoloniale) décidée par l’État centralisé. Il parle d’écoumène en péril. Exemple. La Bretagne est spécialisée en agroalimentaire dont les produits sont destinés à l’ export en raison de la proximité des ports. En conséquence, il y a une uniformité de l’agriculture avec des partiques intensives qui créent une vulnérabilité écologique : euthrophisation, polution des sols et de l’eau.
- Spécialisation dans des filières qui disparaissent ensuite. Exemple 1 Aujourd’hui les indicateurs de précarité sont élevés par exemple dans le Nord de la France ancien bassin minier. Exemple 2. La Sarthe est une zone de passage ce qui a entrainé une spécialisation dans la logistique avec des entrepôts : est-ce viable à l’avenir avec une future pénurie de pétrole ?
- Privatisation de l’espace par l’acitivité économique. Exemple. Vendôme a voulu vendre son nom à Louis Vuitton qui a déjà racheté un bâtiment historique de la ville pour y installer son activité. Il s’agit de la privatisation de l’héritage public et paysager.
La métropolisation
Il s’agit d’un phénomène d’aspiration qui entraîne l’exode rural. Pour ceux qui restent dans les zones rurales, la métropolisation les touchent aussi par leur imaginaire. Leur regard est tourné vers la grande ville qui offre l’accès aux biens et services et qui séduit par un récit d’émancipation qui est véhiculé par la fabrique des imaginaires (cinéma, télévision). Comment se réapproprier des territoires en manque de récit pour y construire un avenir désirable ?
Solution. Une nouvelle géographie : la géographie culturelle
La géographie culturelle, notamment défendue par Augustin Berque a trois grandes hypothèses pour permettre le réenracinement dans les territoires.
- Remonter les pages de l’histoire. Les lieux doivent être à nouveau enseignés.
- Agir sur son milieu. L’être se crée en créant son milieu. En modifiant un milieu une personne se modifie elle-même en retour.
- Avoir un rapport sensible aux lieux, remettre en mot tout ce qui a été caché/perdu.
Illustration à travers la ville d’Alès (travail en cours de l’intervenant)
Alès est la capitale des Cévennes mais elle a perdu son centre historique en raison d’aménagements décidés dans les années 1960. Le centre, qui a perdu ses bâtiments historiques, est maintenant un espace d’habitat dégradé avec de nombreuses barres d’HLM, et a perdu en attractivité. La gentrification touche sans surprise les villages en périphérie de la ville qui ont gardé leur habitat historique.
Alès est empétrée dans l’idéologie de l’attractivité, alors qu’elle pourraît investir dans l’encapacitation des locaux. Le développement des jardins est un exemple désirable d’émancipation. Certains habitants d’Alès ont choisi de quitter leur emploi d’ouvrier à l’usine pour se consacrer intégralement à leur jardin malgré une baisse de revenu.
Ces jardins constituent un point de départ pour la réappropriation du territoire des Cévennes par les habitants. En effet, les jardins font naître une relation des habitants davec les agriculteurs locaux. Les jardins sont un moyen pour les habitants d’Alès de s’ouvrir aux espaces naturels alentour.
Une cartographie pour se réenraciner
Les possibles sont limités par notre imaginaire. L’intervenant propose donc de recruter un nouvel imaginaire par l’onirisme sur carte. Cette idée s’inspire de l’iconographie fantasmagorique que l’on trouvait sur les zones non explorées des cartes anciennes. Pourquoi ne pas faire aujourd’hui la même chose sur les zones des cartes que l’on croit connaître. Voici quelques idées pour proposer un nouveau genre de carte.
- Déplacer les centres. Il s’agit de changer la hiérarchie des informations sur une carte. Par exemple, on peut mettre en avant les espaces naturels (la forêts et les courts d’eau) devant les villes, la mer au détriment de la Terre.
- La Géographie du saisissement La carte offre une projection dans l’avenir, c’est un travail de géographie-fiction. Par exemple, on peut représenter sur une carte un territoire après la future montée des eaux liée au réchauffement climatique.